À une époque où les clients s’attendent à ce que les services bancaires soient fluides et disponibles 24 heures sur 24 sur n’importe quel appareil, la résilience des systèmes de technologies de l’information et de la communication (TIC) est devenue la colonne vertébrale du secteur financier. Dans un récent discours, la Banque centrale européenne (BCE) a souligné la nécessité cruciale pour les banques de développer des systèmes TIC à la fois résilients et sécurisés, deux piliers indissociables qui garantissent la stabilité et la fiabilité de l’ensemble de l’écosystème financier.
Que se passe-t-il lorsqu’un système bancaire central tombe en panne ?
Imaginez qu’il est 3 heures du matin et qu’un centre de données clé se déconnecte soudainement. Peut-être qu’une inondation régionale a endommagé des infrastructures essentielles. Dans ces moments-là, les retards s’enchaînent : les paiements sont bloqués, les décisions sont prises sur la base d’informations incomplètes et la confiance dans une institution se détériore rapidement pour se transformer en une méfiance généralisée à l’égard du système financier. De tels scénarios soulignent pourquoi la résilience des TIC n’est pas seulement une préoccupation informatique, mais aussi une question de stabilité financière.
Sûreté et sécurité : les deux facettes de la résilience
Le message de la BCE est clair : la véritable résilience des TIC englobe deux éléments indissociables, la sûreté et la sécurité.
La sûreté désigne la capacité des systèmes TIC à fonctionner de manière fiable et continue, en garantissant que les services bancaires essentiels restent accessibles et que les données qu’ils génèrent sont exactes et actualisées. Cela signifie que même en cas de défaillance matérielle, de catastrophe naturelle ou d’erreur humaine, les banques doivent maintenir des services ininterrompus et des données fiables.
La sécurité vise à protéger ces systèmes et ces données contre les cybermenaces en constante évolution. Des attaques sophistiquées par ransomware aux intrusions commanditées par des États, les banques doivent maintenir des cyberdéfenses robustes afin de préserver l’intégrité des données et la continuité opérationnelle.
Ensemble, la sûreté et la sécurité constituent le fondement d’un secteur bancaire résilient, capable de résister à des chocs imprévus sans compromettre la confiance des clients ni la stabilité financière.
Renforcer la sûreté grâce à des systèmes et une gouvernance robustes
Pour garantir la sûreté opérationnelle, les banques doivent aller au-delà de la simple prévention des pannes. Elles doivent élaborer des stratégies de reprise complètes, maintenir des systèmes de secours et tester rigoureusement ces processus afin de garantir une reprise rapide en cas de perturbation. Il est important de noter que la fiabilité des données, en particulier des données sur les risques, est primordiale. Les banques ont besoin d’architectures de données modernes qui intègrent plusieurs flux de données dans des plateformes unifiées avec des contrôles automatisés pour signaler rapidement les anomalies.
La gouvernance joue également un rôle crucial. La BCE exige que les risques et la résilience liés aux TIC soient gérés au plus haut niveau au sein des banques, les conseils d’administration assumant la responsabilité directe de définir l’appétit pour le risque et de superviser les indicateurs de résilience. Les défaillances persistantes, telles que les retards dans la communication des risques consolidés, entraîneront une intervention des autorités de surveillance afin d’imposer des mesures correctives.
L’un des principaux défis réside dans la prévalence des systèmes hérités qui, bien que fonctionnels, manquent de la flexibilité et de l’intégration nécessaires dans l’environnement numérique actuel. La mise à niveau de ces systèmes est essentielle pour garantir la sécurité opérationnelle à long terme.
Renforcer la sécurité face à l’évolution des cybermenaces
La cybersécurité reste une priorité absolue, car les banques sont confrontées à des attaques de plus en plus sophistiquées et ciblées. L’essor des ransomwares et des menaces soutenues par des États nécessite des investissements continus dans des capacités avancées de détection, de réponse et de récupération. Les attentes des autorités de surveillance sont élevées : la complaisance n’est pas une option.
Le passage aux services cloud et le recours à des fournisseurs tiers introduisent de nouvelles dépendances opérationnelles. Si les plateformes cloud offrent généralement une sécurité élevée, une dépendance excessive à l’égard d’un seul fournisseur ou des modèles d’intégration trop simplifiés peuvent créer des vulnérabilités et des risques opérationnels. Les banques doivent gérer ces risques liés aux tiers avec prudence, en mettant en place des stratégies de sortie et des plans d’urgence clairs.
La loi sur la résilience opérationnelle numérique (DORA), un cadre réglementaire européen récent, renforce les exigences en matière de signalement des incidents, de préparation aux cyberattaques et de surveillance des risques liés aux tiers. La BCE, en collaboration avec les autorités nationales, s’engage à mettre en œuvre rigoureusement la DORA afin de garantir un niveau harmonisé et élevé de résilience numérique dans l’ensemble du secteur financier.
Une approche collaborative de la résilience
La BCE ne se contente pas de relever la barre pour les banques, elle renforce également sa propre résilience opérationnelle. Des exercices récents ont permis de tester l’état de préparation des autorités de surveillance et des banques à des cyberincidents à l’échelle du système, et il est prévu d’étendre ces exercices dans les années à venir, notamment dans le cadre d’une coopération plus large au sein de l’UE.
Conclusion : le secteur bancaire est désormais fondamentalement une activité informatique
Le principal enseignement à retenir est que le secteur bancaire est devenu fondamentalement dépendant des TIC. La résilience n’est plus une option, c’est un impératif concurrentiel et une nécessité réglementaire. Les conseils d’administration doivent promouvoir une culture de la résilience, investir dans des infrastructures modernes et considérer les actions de chaque employé comme essentielles à la protection de l’écosystème financier.
Lorsqu’un système central tombe en panne à 3 heures du matin, la question n’est pas de savoir si une perturbation va se produire, mais dans quelle mesure les banques et les autorités de surveillance sont prêtes à réagir rapidement et efficacement. La position ferme de la BCE et l’évolution du cadre réglementaire visent à garantir que la réponse soit claire : le secteur bancaire européen est prêt.